Sans une compréhension du rôle pédagogique des mythes, il n’y aura pas de révolution de la formation
Quand la peste frappa l’Empire des Ming, l’Empereur interdit l’accès de sa Cité à tous sauf à sa femme, son fils et son premier ministre. Ne voulant interrompre l’éducation du jeune Prince, il lui fit livrer les plus beaux manuscrits classiques, dont une édition des Quatre Livres Extraordinaires, du Classique des Vers et des 36 Stratagèmes. Mais les semaines passèrent et l’Empereur fut contraint de reconnaître que son fils n’étudiait plus. A toute heure, le Prince courait les jardins déserts, regardait les nuages ou s’endormait sur ses livres enluminés. L’Empereur lui parla ainsi : “Tu as accès aux enseignements des plus grands sages et généraux, d’hommes d’états ou de poètes. Pourquoi n’en profites-tu pas pour fortifier ton esprit et étendre sa vue ?
— Leur lecture m’est pénible, et je n’en vois pas l’intérêt. Ces hommes sont morts et leurs messages sont secs. Je m’y essaie parfois pour vous plaire, mais je m’endors aussitôt.”
Plus tard, alors qu’il parlait des choses du gouvernement avec son premier ministre, l’Empereur lui confia son désarroi : « Rien ne met le Prince à l’étude. Il a pourtant accès aux plus grands écrits.
— Le savoir est un moyen. Il ne se suffit point à lui-même. Vous avez vous-même une belle épée, que vous n’avez plus soulevée depuis votre jeunesse. Il manque à votre fils une raison d’apprendre.
— Où la trouverais-je ? Quand le gouvernement du pays lui incombera, il sera trop tard pour faire son éducation.
— N’eût été la peste, j’aurais moi fait revenir ses excellents maîtres. Ils apportent au Prince le savoir, mais aussi l’exemple. S’il ne doit en y avoir qu’un, toutefois, je choisirais le barde.
— Le barde ! s’exclama l’Empereur. Mais c’est de tous le moins savant !
— De savoir votre fils n’a pas tant besoin. Vous le disiez vous-même, il a déjà les livres. Le barde a couru le pays. Il a été le confident des grands et des grandes, a vu l’effet des vertus et des vices. Il a observé les héros de votre règne et connaît ceux des temps anciens. Il sait surtout, par ses histoires et ses chansons, provoquer l’admiration pour nos aînés. Il fortifiera le Prince et lui donnera envie de s’élever. »
L’Empereur fit venir le barde, et bientôt le Prince reprit l’étude.
A l’ère digitale, nous sommes tous le jeune Prince
Nous avons un accès bon marché à la plus grande bibliothèque de l’Histoire : MOOC (cours en ligne), Wikipedia, Blogs, tutoriels Youtube, ebooks, communautés… Sommes-nous proportionnellement plus savants ? Ce n’est pas certain. C’est une énigme fascinante et de grandes récompenses attendent ceux qui la résoudront. Il y a en ligne tous les secrets nécessaires à votre succès. Mais où les trouver ? Comment faire le tri ? Où trouver la motivation d’apprendre des choses difficiles ? Comment rester concentré, aller jusqu’au bout ? Je vous propose ici une clé d’action, oubliée de trop de professionnels de la formation : le rôle fondamental des mythes, des histoires et des héros dans l’apprentissage.
Le mythe promet une aventure palpitante
Si les humains adorent les bonnes histoires, c’est parce qu’elles sont un accès facile à la joie, l’excitation, le suspense, le soulagement, le frisson de l’amour… A minima, elles sont par leur capacité à retenir notre attention une distraction bienvenue de nos émotions déplaisantes.
Au contraire, le savoir nu n’a pas ces atours là. Il n’a aucune valeur émotionnelle intrinsèque. Le pinceau du peintre, la grenouille du scientifique ou la moto du motard se moquent de ce que ressentent leurs observateurs. Admettre que le réel obéit à ses propres règles objectives, et non à vos souhaits est ce qui fera de vous un bon technicien. Mais cela implique qu’il faut inscrire le savoir-faire dans un cadre qui lui donne son sens, sa valence. Il lui faut une signification pour l’action. Vous pouvez expliquer la mouche drosophile avec la biologie, mais pas pourquoi le biologiste l’observe depuis 12 ans. Pour cela, il faut comprendre les mythes qui habitent le scientifique. Ils sont la promesse d’une aventure où l’apprentissage sera une péripétie.
Le premier élément d’un bon mythe tient à ses héros.
De l’admiration du héros à l’acquisition de ses compétences
Hercule, Athéna, Moïse, Rolland, Batman sont pour leurs contemporains des modèles de succès. Ils provoquent chez l’auditoire une émotion particulière, l’admiration, dont la fonction biologique est de provoquer le mimétisme. Parce qu’un héros vous impressionne, vous chercherez à le jouer, à l’incarner, à l’imiter.
C’est par ce puissant vecteur que nous apprenons les comportements à succès depuis des temps immémoriaux. Le jeune homme devient père en jouant le Père, en incarnant l’esprit du Père. C’est comme si la divinité de la paternité, avec ses comportements encodés dans les mythes qui la concernent, venait vous habiter et vous transformer avant de passer à la génération suivante.
Cette idée en tête, que penser par exemple des formations au management qui proposent un ensemble de techniques isolées pour devenir “innovant”, “plus à l’écoute” ou “leader digital” ? En démembrant un archétype en une série de comportements isolés et explicites, on fait certes l’économie de l’exemplarité personnelle. Pour être soi-même un héros, il faut du temps et du courage, et avoir pratiqué le chemin que l’on recommande. Ces qualités, chez un individu, coûtent plus cher à l’entreprise. Mais en renonçant à l’exemplarité, on perd ce qui permet à l’être humain d’apprendre à haut débit : l’imitation.
Si vous voulez rendre un manager plus autonome, commencez par lui donner un chef autonomisant à admirer.
Les techniques doivent venir ensuite. Car par l’imitation du héros, le disciple fait plus qu’apprendre un geste précis : il accède à un ensemble de métacompétences.
Le mythe vous apprend à apprendre
Un mythe ne se contente pas d’être agréable ou de provoquer l’imitation. Il est en soi une formation à un type spécifique de comportements qui permettent l’apprentissage, à ces compétences qui permettent l’acquisition des autres compétences (les métacompétences). Les mythes de toutes les cultures transmettent, cachées dans l’attitude des héros, les clés du courage, de la persévérance, de l’exploration de l’inconnu, de la planification, de la stratégie, de l’entraide, du respect de la tradition et de l’ouverture à la nouveauté. Si ces savoir-être ne sont pas des gestes techniques, ils sont la clé de leur acquisition autonome.
Le mythe fondateur d’Apple est un bon exemple. L’histoire de Wozniak et Jobs compensant dans un garage leurs faibles moyens financiers par leur génie entrepreneurial est aussi réelle que mon petit conte chinois (c’est à dire bien peu, désolé). La valeur de ce mythe est ailleurs, dans l’exemple d’un ensemble de métacompétences que l’entreprise (et nos sociétés) jugent désirables. Jobs et Wozniak, héros de l’histoire, pavent le chemin comportemental de l’originalité, de l’innovation frugale, de la passion créative.
Résumons : une bonne histoire est plaisante à écouter et courte à transmettre, et donc potentiellement virale. Elle permet un apprentissage rapide d’un ensemble cohérent de comportements à succès, par l’admiration et donc l’imitation des héros. Elle contient dans son déroulement les avertissements et stratégies de nos aînés, qui seront nécessaires pendant le voyage d’apprentissage. Une bonne histoire est donc à la fois un manuel comportemental, un Redbull motivationnel et un virus bienveillant. Voyons maintenant des exemples de formations digitales qui manquent de ces éléments narratifs, et des exemples de solutions pour leur rendre leur attrait et leur pouvoir d’inspiration.
Ce qu’il manque à la plupart des formations en ligne
L’absence de héros
Sarah est employée d’une grande entreprise française. Ses journées sont bien remplies. Sarah sait probablement chercher la réponse à ses interrogations immédiates sur Wikipedia, mais ne s’en sert pas au delà de la vérification d’une date ou d’une définition. Les pages les plus longues et complexes demanderaient trop de temps et de concentration. Peut-être son entreprise a-t-elle souscrit à un catalogue de MOOC, mais Sarah ne sait pas bien par où commencer. Après tout, la page d’accueil d’une plateforme de MOOC donne le vertige :
Il manque d’abord à Sarah un héros, un senseï. Elle pourrait le trouver en sa manager Cécile, mais à certaines conditions. Il faut en effet que :
- 1. Cécile provoque son admiration, par exemple par son haut niveau de compétence, par ses marqueurs de réussite et de statut, par son apparent épanouissement professionnel,
- 2. Cécile s’intéresse à la progression de Sarah, comme un maître artisan accompagne son apprenti. Qu’elle prenne le temps de la discussion, de la mise à l’épreuve, de la personnalisation, du feedback, de la démonstration,
- 3. Cécile ne soit pas totalement ignorante des grands principes de la pédagogie. Qu’elle sache choisir les mots qui stimuleront sans effrayer, aller du simple au complexe, utiliser les principes de répétition, de passage à l’action, de formation par l’allégorie ; qu’elle sache enfin où trouver les experts et compétences nécessaires à la progression de Sarah.
Ces conditions sont difficiles à réunir. Si Cécile est une manager accaparée par les exigences bureaucratiques éloignées du métier, qu’elle ne se forme jamais et qu’elle paraît au bord de l’épuisement nerveux, comment pourrait-elle provoquer l’admiration de Sarah ? Si elle encadre un nombre toujours croissant de collaborateurs, où trouvera-t-elle le temps de les accompagner finement ? Pourquoi investirait-elle ces longues heures si le turnover est tel que Sarah ne restera pas plus d’un an ou deux ?
Oublier l’importance des héros est une erreur caractéristique de la pensée cartésienne qui postule qu’on peut -qu’on doit– douter des traditions et reconstruire, soi-même, tout son savoir sur une base explicite et rationnelle. Dans la pratique, c’est peu probable. Prenons l’exemple de la recherche fondamentale, où règnent la science et l’abstraction. L’économiste Karl Polanyi écrivait ainsi, au sujet des Etats-Unis après la Seconde Guerre Mondiale :
“Alors que les savoirs scientifiques sont enseignés désormais, dans leur forme explicite, dans des centaines de nouvelles universités, il semble que l’art implicite de la recherche scientifique ne les ait pas encore pénétrées. Les régions d’Europe dans lesquelles la méthode scientifique est apparue il y a 400 ans sont toujours aujourd’hui les plus fécondes, en dépit de leur appauvrissement économique relatif. […] Sans la migration des scientifiques européens dans le nouveau monde, les centres de recherche n’y auraient guère fait de progrès.”
La Chine rencontre aujourd’hui un défi similaire. Ces quelques pages du déjà cité philosophe M. Crawford expliquent brillamment le rôle du vieux scientifique, héros expérimenté et maître artisan, dans la transmission de métacompétences à ses apprentis chercheurs.
Évidemment, mobiliser des personnels expérimentés et exemplaires est coûteux. Comment pourrait-il en être autrement ? A ne pas correctement les rémunérer et les promouvoir, on créera difficilement l’admiration -et donc l’imitation– des plus jeunes (que ce problème existe au sein de l’Education Nationale est un autre sujet d’investigation).
A défaut de trouver ces héros au sein de l’entreprise, on pourra les chercher dans l’imaginaire collectif. On trouve un bon exemple de cette approche dans la plateforme d’elearning Masterclass : la promesse d’apprendre auprès des grands maîtres, dans une mise en scène irréprochable qui évoque la proximité.
L’inconvénient tient à ce que pour provoquer l’admiration, la renommée de ces héros doit être d’autant plus grande qu’ils sont éloignés de l’apprenant. On ne pourra mobiliser ces sommités que sur des contenus standards, figés, dont l’elearner devra faire seul l’adaptation à ses besoins.
La solution idéale sera probablement mixte : par la sélection et la promotion soigneuse de chefs à même d’incarner un idéal d’apprentissage ; par le soin porté à faire des managers des exemples admirables de succès, et non des bêtes de somme ; par l’invitation régulière de héros et experts externes à l’organisation, pour donner à tous des modèles d’excellence ; et ensuite, seulement, par la mise à disposition d’un catalogue fourni et attractif de contenus digitaux.
L’absence de structure narrative
Les formations en ligne sont -au mieux- agencées comme un manuel scolaire : concept, introduction, exercices, test…
Ce format conviendra à un apprenant disposant déjà des métacompétences nécessaires : une bonne raison de persévérer, une capacité à rester concentré, à bloquer des temps réguliers, à répéter et répéter les passages difficiles jusqu’à leur maîtrise… A en croire les statistiques, c’est rarement le cas : le taux moyen de complétion des MOOC est de 15% (1).
En mimant la progression pédagogique d’une classe de collège de 1950, les professionnels de la formation font une double erreur. D’abord, parce que ce modèle est critiqué et sans doute à revoir dans l’univers de l’enseignement scolaire. Ensuite, parce que nous vivons un âge d’or de la narration. Les mondes du jeu vidéo, des séries, du marketing moderne, de la politique et de la psychologie nous offrent d’innombrables outils pour construire des histoires captivantes, à même de conserver l’attention et de transmettre des messages sans en avoir l’air.
Laissez-moi vous donner un exemple : Kerbal Space Program est un jeu de simulation de construction de fusées, doté d’un modèle physique réaliste. Dans ce “bac à sable”, vous agencez les différents modules de votre aéronef en toute liberté, contraint seulement par votre budget et par les lois de la gravitation, de la thermodynamique et des trajectoires stellaires :
Dans le mode Histoire du jeu, les briques de construction de votre fusée vous sont libérés peu à peu, à mesure que vous atteignez des objectifs scientifiques d’abord accessibles (collecter la poussière de la piste de décollage) puis ambitieux (rapporter un échantillon de roche lunaire). Au cours de votre exploration, vous vous heurterez à des drames (“le bouclier thermique du spationaute n’était visiblement pas suffisant”), des rires (“j’aurais peut être dû prévoir un parachute”) et des surprises (“on peut vraiment faire ça avec aussi peu de carburant ?”). Je suis convaincu que cette approche narrative, exploratoire et libre a formé plus de futurs ingénieurs que le MOOC Coursera sur l’aéronautique.
L’oubli des métacompétences
La plus grande difficulté dans l’exploitation des ressources en ligne est aussi la plus discrète. Elle ne réside pas dans les ressources financières (beaucoup de contenus sont gratuits, la plupart sont peu coûteux), le matériel informatique (tout le monde a un smartphone) ou même la barrière de la langue, qui été allégée par l’amélioration des traductions automatiques. Elle se cache dans un ensemble de savoirs comportementaux nécessaires à l’apprentissage : comment mémoriser, se concentrer, se discipliner, surmonter les phases de stagnation ou de régression, organiser son exploration, libérer du temps pour l’apprentissage, l’exploiter au mieux, lire rapidement, trouver des opportunités de pratiquer, des acolytes, des mentors…
Si vous avez de la chance, vous avez acquis une partie de ces compétences par tâtonnement et imitation pendant votre cursus scolaire. Et encore : je n’ai rencontré que peu de gens qui avaient cherché à les développer activement, par exemple en explorant les découvertes des sciences cognitives.
On l’a vu, les mythes et leurs héros apportent ici des enseignements bienvenus. A l’école, l’exemple de vos parents, la représentation populaire du médecin, du couvreur ou de l’archéologue ont pu jouer ce rôle. Encore faut-il que votre milieu social vous ait exposé à ces archétypes. Le problème, c’est que nous n‘avons à ce jour pas de mythes enthousiasmants pour l’apprentissage autodidacte. Personne ne se vante trop encore d’avoir réussi un difficile cursus sur Udemy comme on pourrait afficher son illustre passé de polytechnicien ou son métier de pilote. L’autodidacte n’a pas passé de rite initiatique, n’a pas de communauté, n’a pas de titre socialement reconnu à brandir. Et par conséquent, à quoi ressemble-t-il, le voyage d’un elearner ? Par où commencer ? Regarder des vidéos dans le métro ? Étudier au calme dans un chalet pendant trois mois ? Rejoindre des entrepreneurs dans une salle de la Station F ? Je ne sais pas, et je gage que vous ne savez pas non plus. Faute d’un mythe pour en transmettre les exigences, “se former en ligne” reste une impasse comportementale pour la majorité d’entre nous.
Certaines innovations culturelles pourraient éclairer notre recherche du mythe de l’e-autodidacte. D’abord, la figure du hacker :
C’est bien sûr dans l’informatique que l’apprentissage digital a le plus progressé. Les informaticiens sont exposés à l’obsolescence rapide de leurs savoirs. La formation continue est une condition de leur survie à court terme. Ils se heurtent quotidiennement à des blocages techniques inédits, et ont l’habitude de trouver les solutions en ligne, auprès de communautés. Pour eux, le mythe du hacker/développeur génial est donc un bon exemple, mais il masque la réalité psychologique et sociale de ces métiers : ils nécessitent une bonne intelligence, une personnalité particulière et une formation initiale solide. On conviendra qu’il reste limité dans les profils qu’il peut inspirer. Plus encore, le mythe du hacker est muet quant à leur phase d’initiation : les films les représentent souvent déjà experts. Il manque en cela un Rocky du développement informatique (je peux me tromper, partagez-moi un exemple en commentaire).
Une autre illustration est à chercher du côté de Freeletics, une app de sport pour smarphone.
Les défis sont les mêmes que pour tout autre apprentissage digital : personne ne progresse sans effort, l’autodiscipline est difficile, etc. Pour y répondre, l’application s’efforce de créer un imaginaire motivant en multipliant les astuces :
- une identité graphique forte, avec de très nombreux héros et héroïnes présentés comme réels qui relatent, photos à l’appui, leur histoire sur le blog (“Transformations stories”),
- une personnalisation présentée comme algorithmique (comprendre “magique”) des exercices, niveaux de difficulté, et de très nombreuses options pour l’utilisateur. L’app donne le sentiment d’avoir pris votre mesure. Vous êtes le héros,
- une éthique de l’effort, du no pain no gain : plutôt que de promettre des progrès faciles, l’entreprise assume son élitisme et l’exigence de ses programmes. C’est une chose rare dans le monde de la formation professionnelle où tous les inscrits, ayant payé, doivent obtenir leur certificat,
- un abonnement coûteux, qui paradoxalement contribue à l’engagement,
- la gamification du design : courbes de progression, badges, applaudissements, points de difficulté…
- des fonctionnalités destinées à créer des communautés locales (blogs, accessoires, meilleurs scores locaux, clubs et évènements)
- et puis, voyez le nom des programmes :
Pour conclure, je crois que le formateur doit être attentif aux mythes qui structurent l’esprit de son public. L’apprentissage digital ne prendra sa pleine efficacité que s’il s’accompagne d’une ingénierie des représentations sociales qui guident l’apprenant, le motivent, et lui montrent les savoir-être nécessaires à son parcours. Le formateur se doit d’avoir lui-même fait son parcours initiatique, de donner la preuve à voir de son succès personnel (héros) ou d’être capable de relater celle des héros qu’il aura accompagné (barde). Cette exigence fait mentir la promesse commerciale de formations encapsulées, bon marché, “scalables” sans effort et accessibles à tous. Il est plus probable que le digital permettra l’émergence de communautés d’apprentissage, structurées autour de personnages inspirants et maîtres des techniques pédagogiques, qu’ils soient managers, professeurs, experts ou parents. Cela signifie aussi, hélas, qu’à défaut d’une action politique énergique, la reproduction sociale a de beaux jours devant elle.
Cet article a initialement été publié sur LinkedIn.